Bricolage urbain

Par Isabelle Bagnoud

Journal de Sierre, jeudi 3 avril 2003

Sise sur six communes, la station de Crans-Montana ne dispose pas de politique d'aménagement d'ensemble du territoire. Conséqunece: une mosaïque de consctructions souvent incohérente. A quand un plan directeur qui pourrait profiter à l'emblématique Hôtel du Parc?

"On construit de gros chalets en série, mauvaises reproductions stéréotypées des chalets de l'Oberland bernois, d'Autriche ou d'ailleurs", le constat est sévère. Il émane des architectes Isabelle Evequoz, Gilbert Strobino et Ambroise Bonvin lors d'une récente conférence sur le patrimoine bâti du Haut-Plateau dans le cadre du PAES. "On emballe, on camoufle le passé." Et surtout, selon les conférenciers, on assiste à une politique du remplissage, sans concept urbanistique et sans grande signification esthétique ou intellectuelle. 

Pourquoi? Parce que le Haut-Plateau  ne dispose d'uaucun plan de zone pour l'ensemble de la station. Chaque commune a le sien. Si bien que les architectes se sont attelés à faire du copier-coller pour leur analyse. Six communes verticales pour une station en horizontalité, cela ne facilite pas la tâche.

"On a fait des progrès", lance le président de Lens Fernand Nanchen. Si les six communes possèdent le même règlement des constructions, l'unique réflexion menée sur l'aménagement de la station est le rapport Fingerhuth (lire le commentaire ci-dessous), commandé par le canton en 1972. Depuis, pas de plan directeur commun concernant l'aménagement. "Ce serait l'idéal", plaide Francis Tapparel, président de Montana. Fernand Nanchen admet qu'il est difficile de se poser en juge de demain. Prenant exemple sur la route de Lens, déclassée en zone à construire, il explique: "Nous pensions en avoir pour 20 ans alors que tout s'est construit en moins de 5 ans!" Persuadé aujourd'hui qu'il faut un plan d'aménagement commun parce que "nous payons aujourd'hui cet état sauvage de construction."

Proposition des conférenciers: réorganiser et réévaluer les rapports entre constructions privées et espace public, réserver des zones vides pour rétablir un équilibre. Dresser, par exemple, une colonne vertébrale de la colline du Parc, prolongée de l'étendue du lac Grenon, puis de l'espace du vallon s'étendant jusqu'au Zier. Pour définir, peut-être, selon Fernand Nanchen, "ce qu'il nous reste encore à préserver."

Objet de convoitise: la colline du Parc

Emblématique: la colline du Parc. Centre historique et géographique de la station, le terrain focalise aujourd'hui les convoitises de tout bord. Il reste peu de terrain en station. Quid de son futur? Selon Francis Tapparel, à l'intérieur du périmètre du plan de quartier se trouvent six copropriétaires. Le lieu est classé en zone forêt et zone à construire. Il y a aujourd'hui un projet, "que nous essayons de rendre compatible avec nos intentions, en préservant au mieux la pente ouest du parc qui donne sur le lac et les accès."

Trois procédures sont actuellement en cours, ce qui ne devrait pas empêcher une mise à l'enquête. C'est dire que l'on pourrait construire. "A moins que les municipalités, avec l'accord de la propriétaire de l'hôtel, achètent la pente ouest." Pourquoi n'avoir pas classé la colline en zone de protection du paysage lors du plan d'affectation dans les années 70? Une pesée entre intérêts privés et publics...

Commentaire - Tout était dit!

Tout le monde devrait mettre son nez dans les deux tomes du plan d'aménagement de Crans-Montana dirigé par Carl Fingerhuth à la demande du Conseil d'Etat en 1972! Tout y est dit. Des mises en garde sur l'augmentation de la parahôtellerie et de ses coûts, des problèmes de circulation , des dangers d'un développement qui ne prend pas suffisamment en considération l'intérêt général. L'aménagement du territoire est apprécié sous tous les angles et les auteurs penchent, après analyse de la situation d'alors, pour une politique qualitative plutôt que quantitative - or le modèle choisi par les communes depuis correspond plutôt à la variante quantité à éviter! Il y a peut-être ici ou là des analyses qui s'avèrent moins pertinentes aujourd'hui, mais les enjeux exposés restent les mêmes. Qu'on ne dise pas aujourd'hui qu'on ne savait pas.

Isabelle Bagnoud - JDS

 

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